Profitez-en, après celui là c'est fini

Le Général (The Prisoner, 1967)

janvier 25th, 2010 Posted in Non classé, Ordinateur célèbre, Série

Les britanniques ont une tradition assez exceptionnelle de séries télévisées de science-fiction : Quatermass, Dr Who, The Avengers, The Champions, Moonbase 3, Timeslip, The Tomorrow People, Torchwood,… sans oublier les productions de Gerry et Sylvia Anderson telles que Fireball XL5, Thunderbirds, UFO, Space 1999, Captain Scarlett.

La plus marquante des séries britanniques est pour beaucoup The Prisoner, qui a eu dix-sept épisodes entre 1967 et 1968 et qui a récemment fait l’objet d’un remake en six épisodes avec l’acteur Jim Caviezel.

Créée par son acteur principal, Patrick McGoohan (décédé il y a un an), la série constitue une suite non-officielle à un feuilleton d’espionnage plus traditionnel, Danger Man (1960-1968).
Après avoir démissionné de ses fonctions dans le contre-espionnage, le héros de The Prisoner est enlevé et emmené dans une île dont il ne peut plus s’échapper. Il n’a plus de nom, on l’appelle numéro 6. Il est régulièrement interrogé par un dénommé numéro 2 (qui n’est généralement pas le même d’un épisode à l’autre) car on cherche à connaître les motifs de sa démission. Le village où il vit (qui s’appelle précisément « le village ») est un lieu des plus déstabilisants où chacun affecte une fausse bonne humeur, où il est impossible de distinguer les membres du complot des autres prisonniers et où les moindres gestes du numéro 6 sont épiés par des batteries de caméras plus ou moins discrètes.
Tout l’enjeu de la série est de savoir si le héros finira par savoir qui est responsable de la situation, s’il rencontrera le mystérieux numéro 1, et s’il parviendra à s’échapper ou au moins à ne pas perdre la raison.

The General (sixième épisode) n’est peut-être pas le meilleur épisode de la série mais puisqu’un ordinateur y tient un rôle majeur, c’est celui dont il fallait que je parle ici. La série mérite quant à elle une exploration approfondie, notamment sur les thèmes de la surveillance et de la raison (ou déraison) d’état.

Au commencement de l’épisode, numéro 6 constate que tous les habitants du village rentrent chez eux pour aller visionner en direct un cours d’histoire donné par un homme que tous appellent « le professeur ». On lui conseille fortement d’assister au cours lui aussi, et il s’y plie. L’émission télévisée ne dure que trois minutes et on promet à ceux qui la visionnent que ce temps leur suffira pour ingurgiter l’équivalent de trois années d’étude.
Le cours, diffusé de manière subliminale, grave dans l’esprit de ses spectateurs des dates et des faits, à leur insu. Ainsi, Numéro 6 découvre avec étonnement qu’il répond avec une justesse mécanique à des questions telles que : « Quelle est la date du traité d’Andrinople ? »« septembre 1829 ». « Et en 1830 ? » — « L’indépendance de la Grèce est reconnue ». « Par ? » — « La russie, la France et la Grande-Bretagne »

L’apprentissage rapide a cependant un ennemi, le professeur lui-même qui, sur une bande enregistrée, parle de son invention comme d’une abomination et martèle : « Il n’y a qu’un moyen d’être libres : détruisez le général ! ».
Un administrateur du village, Numéro 12, semble convaincu lui aussi qu’il faut détruire le général, qui s’avère être un ordinateur omniscient impliqué dans le processus d’apprentissage rapide. Numéro 6 n’a pas confiance en Numéro 12, mais accepte tout de même d’aller saboter l’émission en diffusant un message émancipateur en lieu et place du cours prévu à l’origine.
Au passage, Numéro 12 fait remarquer à Numéro 6 que son apprentissage est idiot : à la question « Qu’a été le traité d’Andrinople ? » (et non « quelle est la date du traité d’Andrinople »), le prisonnier répond « Septembre 1829 ». Un écho aux débats de l’époque sur les méthodes d’éducation ?  (apprendre ou comprendre…)
L’épisode évoque aussi la question de la créativité, car l’épouse du professeur est artiste et enseigne l’art. Au sujet de l’apprentissage, elle dit « on n’apprend que lorsque l’esprit le veut ». Numéro 6 parvient à la mettre en colère en la représentant de manière figurative en uniforme de l’armée britannique — on comprend que ce dessin a un sens fort pour elle qui, comme la plupart des pensionnaires du village est ou a été agent secret.

Le sabotage du cours du professeur échoue, mais pour finir, Numéro 6 parvient tout de même à détruire l’ordinateur en lui soumettant une simple énigme : « Why ? » « Pourquoi ? »
Ce n’est pas le premier exemple d’ordinateur de fiction qui surchauffe puis est détruit de cette manière. L’exemple le plus fameux du genre est sans doute Alphaville: Une étrange aventure de Lemmy Caution (1965), par Jean-Luc Godard.

  1. 13 Responses to “Le Général (The Prisoner, 1967)”

  2. By Bishop on Jan 25, 2010

    Le Remake est moyen, il y avait moyen de faire quelque chose de bien mais cela tombe à plat. il faudrait que je me procure l’original.

  3. By Jean-no on Jan 25, 2010

    C’est bien et vraiment riche… Par contre j’ai peur que les épisodes soient un peu longuets et poussifs pour le spectateur d’aujourd’hui.

  4. By Bishop on Jan 25, 2010

    Bon je vais faire l’effort de les trouver, et monsieur le professeur vous veillez tard!

  5. By Jean-no on Jan 25, 2010

    C’est vrai que je veille tard et ce n’est pourtant pas mon intérêt.

  6. By vincent on Jan 25, 2010

    Dans les bonnes séries anglaises de SF il y a aussi The Tripods qui était passé sur FR3 il me semble dans les années 80.

  7. By Jean-no on Jan 25, 2010

    Je ne connais pas mais ça a l’air bien intéressant. C’est fou le nombre de séries SF qu’ils ont eu, si on compare à la tv française. Et ce n’est pas forcément parce que leur public aime ça : beaucoup n’ont eu qu’une saison ou deux. Donc il y a une tradition et une volonté du côté des producteurs.

  8. By pull on Jan 25, 2010

    Tiens! Un autre ordinateur surchauffe de manière identique dans un des récits du Concombre Masqué. Si je me souviens bien la question était : « répondez par oui ou non, allez-vous me répondre non? ».
    ça me fait penser que je relirai bien le Concombre Masqué.

  9. By Jean-no on Jan 25, 2010

    @pull : si tu me retrouves l’épisode, ça m’intéresse !

  10. By pull on Jan 25, 2010

    arf! je n’ai plus sous la main les Concombre Masqués que je lisais petit, je penses que c’est dans les premiers albums mais où?
    Peut-être qu’une visite au 83 rue Pajol, Paris 18ème nous en dirait plus.

  11. By Jean-no on Jan 25, 2010

    Oui, c’est peut-être là qu’il faut aller.

  12. By matthieu on Jan 26, 2010

    ha, le prisonnier et le concombre masqués, quels souvenirs…

    j’ai en effet commencé à regarder à nouveau les épisodes du prisonnier avec une amie il y a un an, et ça ne passait pas à cause du rythme, pas du tout évident pour les spectateurs de cinéma/séries contemporaines.

    pour ma part j’ai découvert cela il n’y a que 4 ans mais je suis un très grand fan, il n’y a pas beaucoup de séries qui ont ce niveau, et quel final ! je n’en reviens toujours pas du pétage de plomb du dernier épisode

    pour retrouver les premiers albums du concombre masqué de nos jours c’est une autre histoire par contre, assez rare…

    il y a quoi rue pajol? une bonne librairie?

  13. By Jean-no on Jan 26, 2010

    Rue Pajol, il y a la librairie de mon frère, qui fait de l’occasion et de la collection (pub!)

  14. By matthieu on Jan 26, 2010

    ok merci, je note l’adresse pour un de mes prochains passages à paris, quoique je sois très bien servi à bruxelles :)

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